Fiction 398 by Collectif

Auteur:Collectif [collectif]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantastique, Nouvelles, SF
Éditeur: Opta
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Nouvelles du même auteur déjà parues dans FICTION : « Ascenceurs et Assesseurs » (Executives and elevators) (365) – « Les esprits des vastes profondeurs (spirits from the Vasty deep) (390).

Marottes1

MICHEL LAMART

« J'ai toujours mis double couvert à ma solitude. »

Daniel Boulanger ;

Les portes.

« Le supplice est plus dur aux bourreaux qu'aux victimes. »

Eluard,

Nouveaux Poèmes.

1

La rue grise, fleuve de bruits au cours assagi par la nuit, rêvait encore quand L. descendit de chez lui, le cœur barbouillé d'un relent de sommeil mêlé à l'arôme du café. Les voitures en stationnement, gros insectes aux élytres luisants, somnolaient le long du trottoir. On eût dit des épaves échouées dans le ruisseau, frileusement serrées l'une contre l'autre, dans l'haleine du brouillard. Quelques vieux chiens rôdaient aux abords des poubelles renversées, laissant traîner un mufle inquisiteur dans les flaques de nuit qui laquaient le pavement.

L. allait au bureau.

Comme chaque matin, il s'était jeté presque inconsciemment dans le puits de l'ascenseur, tel un automate. La molle descente, au cours de laquelle il eut vaguement l'impression de plonger en lui-même, prolongea cet état d'apesanteur, proche du sommeil, qui brouillait sa perception et déformait la réalité. C'était comme s'il s'évadait malgré lui de son sommeil.

Le hall contre le plancher duquel la cabine vint buter ouvrait directement sur la chaussée. À gauche, un escalier conduisait aux caves. L. n'y était jamais descendu. Il avait toujours trouvé d'excellents alibis pour se dispenser de cette corvée. Il les imaginait telles des grottes profondes à demi comblées de ténèbres, dans lesquelles des légions de chauves-souris venaient, pendant le jour, se garantir de la lumière. La nuit, ce devait être le rendez-vous de tous les mendiants, les assassins, les chômeurs, les homosexuels, les immigrés clandestins, bref, de tout ce que la société comptait de marginaux. L. rougissait comme un gosse pris en faute en imaginant les bacchanales qui devaient s'y dérouler chaque soir. C'étaient les mêmes qui, dans la journée, traînaient leur ennui dans le quartier, affichant un désœuvrement et une détresse suspects au dire des braves gens et des commerçants qui les épiaient du coin de l'œil toute la journée.

Comme d'habitude, le type était planté bien en vue sous la douche de lumière pisseuse du trottoir d'en face. Grand, maigre, il était enveloppé dans les plis d'un imperméable vert d'eau, au col relevé. Son visage mangé d'ombres était coiffé d'un chapeau qui étouffait la flamme de ses yeux. Son maintien raide lui donnait l'aspect d'un mannequin évadé d'une vitrine de confection pour hommes.

C'était le même quidam qui, la veille au soir, l'avait suivi jusqu'à la tour et devait le filer depuis au moins une semaine. Il n'avait apparemment pas bougé. Bien qu'il fût impensable qu'il eût passé la nuit ici. Que désirait-il ? Il ne manifestait rien d'autre qu'une sorte d'attention passive, presque désintéressée. L. sentit couler sur lui la fraîcheur de la nuit pâlissante au moment où la peur emplissait ses veines d'aiguilles d'acier rouillées.

Il frissonna, parut hésiter un dixième de seconde : allait-il traverser la chaussée pour lui demander

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.